SolutionScience #010 | Comment flinguer une démo en 30 minutes chrono

Le moulin à paroles. Je t'avoue, je suis tombé dans ce piège au début de ma carrière : j’avais la conviction que plus je montrais en démo, plus je prouvais ma valeur (et celle du produit).
Résultat : j’enchaînais mes démos en parlant beaucoup trop. Et le pire, c’est que ça m’a pris des années pour m’en rendre compte ! Tu sais pourquoi ? Parce que beaucoup d’AEs ne s’en rendent pas compte non plus. Quand tu sors de la salle et que ton AE te dit : « super, tu as tout montré », tu crois que tu as bien fait ton job.
Spoiler : non.
En réalité, tu as juste perdu ton prospect en route, entre Meaux et Château-Thierry, c'est dire ...
Le problème, c’est qu’une démo n’est pas un marathon de clics déguisé en tutoriel. Je vais même aller un poil plus loin : une démo n'est pas une démonstration produit. Ce n'est pas fait pour montrer comment ça marche. Si tu attends plus de 20 minutes avant de montrer le cœur de ta solution (c'est à dire les problèmes business qu'elle résout concrètement), tu prends le risque de le faire devant des gens déjà à moitié comateux. Sérieusement, quel prospect est encore concentré après une demi-heure de navigation dans des menus obscurs ? Aucun. Et quand le moment clé arrive, tu le balances à une audience qui pense déjà à autre chose.
J'appelle ça le « syndrome du professeur ». Tu as peur des silences, tu veux combler chaque moment, tu veux prouver que tu sais en déroulant ton discours. Mais pendant que tu fais ça, le client pense :
« Ok, mais moi je voulais juste voir comment ça règle mon problème. »
Je me rappelle d’un prospect C-level qui m’avait coupé net après 10 minutes :
« Désolé Philippe, mais quand est-ce qu’on voit enfin ce que ça change pour nous ? »
Une petite claque finalement très bénéfique pour adoucir mon égo : c’est ce jour-là que j’ai compris que trop expliquer, c’est tuer l’attention. Et qu’en démo tu dois rapidement faire la démonstration de l'impact de ta solution.
Un point qu’on oublie aussi trop souvent : la discovery ne s’arrête pas quand la démo commence ! Au contraire, c’est souvent pendant que tu montres la solution que les prospects révèlent leurs vrais besoins, ceux qu’ils n’avaient pas formulés en amont. Si tu enchaînes ton discours sans laisser de place pour une conversation, tu passes totalement à côté de ces signaux. Si tu continues à poser des questions simples comme « Est-ce que c’est quelque chose qui vous arrive souvent ? » ou encore « Comment vous gérez ça aujourd’hui ? » tu gardes l’échange vivant et tu montres que tu es là pour comprendre et adresser leur besoin.
Parlons de timing maintenant. Combien de temps pour une bonne démo ? En réalité, si tu fais une session d’une heure, ta vraie fenêtre d’attention est de 20 à 25 minutes grand max. Au-delà, tu perds tout le monde. Et sur ces 20 minutes, si tu passes plus de la moitié à parler sans respirer, tu transformes ta démo en tuto soporifique. Ton rôle n’est pas d’être l'érudit technique dans l'histoire mais de donner au prospect l’envie de s’approprier la solution.
Je sais que tu as déjà entendu cette phrase en interne :
« Montre tout, sinon ils vont penser qu’on ne sait pas faire. »
C'est faux. Montre tout, et tu es sûr qu’ils vont oublier 90 % de ce que tu as dit. Une démo se construit sur un fil narratif efficace. C’est une histoire. Et une histoire, ça doit être simple, clair, percutant.
Voici ce que je te conseille de tester puis de mettre en place progressivement pour tes prochaines démos :
- Va droit au but : montre rapidement ce que le client attend de voir. Le moment “wahou” doit arriver très très tôt, pas après 15 minutes.
- Reste sous les 25 minutes : au-delà, l’attention baisse. Si tu as plus à dire, garde du temps pour les questions ou un atelier séparé.
- Chronomètre-toi : pas plus de 2 minutes sans interaction. Si tu parles plus longtemps, pose une question. Même un simple « en quoi cela peut changer votre workflow actuel ? » suffit à relancer efficacement. Une démo est également une discovery ! #discoveryneverstops
- Ose le silence : si tu poses une question, attends la réponse. Même si ça flotte. C’est dans ces silences que tu découvres les vrais enjeux.
- Demande du feedback interne : fais ta démo à un autre SE ou un AE d'expérience et demande-lui de noter ce qu’il retient. Si ce ne sont pas tes messages clés, tu parles trop.
Et toi, tu es déjà tombé dans ce piège du professeur ?
Merci d’avoir lu ce nouveau numéro de SolutionScience.
On se retrouve vendredi prochain ! Si tu penses que ce texte peut aider un SE, partage-le. Et si tu n’es pas encore abonné, c’est juste en-dessous !
Philippe